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Naissance de la Sécurité sociale, les ordonnances de 1945
En 1945, la classe ouvrière a pris une place majeure dans la lutte contre l’occupant et contre Vichy. Malgré tous les accords politiques d’union nationale, le spectre de la révolution hante les tenants de l’ordre bourgeois.

Dans ce contexte deux conceptions émergent.

Une première formulée dans « Les jours heureux», programme élaboré par le CNR sur «les réformes indispensables sur le plan social», dont le paragraphe suivant :

«un plan complet de Sécurité sociale visant à assurer à tous les citoyens des moyens d’existence dans tous les cas où ils sont incapables de se les procurer par le travail avec gestion appartenant aux représentants des intéressés et à l’État».

La conception du programme du CNR est très clairement celle d’un « régime universel » protégeant « les citoyens » géré avec l’État. Une conception proche du plan Beveridge qui donne naissance au National Health Service (service national de santé) en Angleterre.

 

Pour autant ce n’est pas ce modèle qui va inspirer les ordonnances de 1945 mais le programme de la CGT que l’on peut retrouver dans plusieurs documents dont :

• Le programme de la CGT en matière de Sécurité sociale, présenté par Georges Buisson le 6 décembre 1944 «pour la grande loi de Sécurité sociale», constitue un véritable brouillon des ordonnances de 1945. Ce programme souligne le caractère de « classe » de cette nouvelle législation. 

Y sont déjà inscrites des mesures qui seront au coeur de la Sécurité sociale de 1945 : suppression du ticket modérateur en cas de maladie de longue durée, fin de la retraite par capitalisation…

Pierre Buisson (1878-1946)


Syndiqué à la CGT dès 1908 – En août 1943, il devient un des délégués officiels de la CGT à l’assemblée consultative provisoire, au côté d’Ambroise Croizat. Il siège à la commission du travail et des affaires sociales. Il restera membre du secrétariat de la CGT de la Libération jusqu’à son décès.

Au même moment où le plan CGT est publié, Henri Raynaud secrétaire confédéral (ex-unitaire) de la CGT, écrit un article dans la vie ouvrière : « Il faut garantir tous les travailleurs sans aucune exception contre tous les risques d’incapacité de travail. De véritable assurances sociales et la vieillesse, tous les cas d’incapacité totale ou partielle de travail résultant soit de la maladie soit de l’accident de travail…De véritable assurances sociales doivent, en cas de maladie, accorder l’entière gratuité des soins médicaux et pharmaceutiques. De véritables assurances sociales doivent enfin confier aux assurés eux-mêmes la gestion de leur caisse par la création de caisses uniques par département ou arrondissement ».

Henri Raynaud (1890 – 1970) 

Employé aux PTT. Il occupe des responsabilités dans le Syndicat unitaire des agents des PTT (1922) et dans la confédération. A sa scission, il devient un des responsables de la Fédération unitaire des PTT ainsi que de l’Union des syndicats unitaires de la région parisienne.

En 1926, il entre au comité central du Parti communiste français et en 1930 il devient un des dirigeants de la CGTU.

Après la réunification de la CGT, il devient secrétaire général de L’Union des syndicats de la Région Parisienne. Emprisonné le 18 octobre 1939, il s’évade de prison en juin 1941 et sera un des signataires de l’accord du Perreux. Grand défenseur de la Sécurité sociale, il sera le premier président de la Fédération Nationale des Organismes de Sécurité Sociale (FNOSS).

Ainsi, Henri Raynaud qui, en 1928, avec le parti communiste français avait stigmatisé la loi sur les assurances sociales et Georges Buisson qui l’avait soutenue se retrouvèrent sur un
même projet pour la Sécurité sociale. C’est là que réside la véritable inspiration des ordonnances de 1945.