Bien que notre système d’assurance-chômage soit excédentaire, l’UNEDIC prévoit 17,1 milliards d’euros d’excédents sur la période 2023-2025 (Le Monde,21/02/23), le premier ministre vient de nous annoncer la 3e réforme de l’ère Macron. Complètement décomplexé, le gouvernement va acter par décret, après des pseudos-concertations, une régression sociale sans précèdent.
Passage en force à nouveau, parce que cette réforme
Si le timing répond à la volonté d’envoyer des signes de rigueur budgétaire aux agences de notations de la « Dette », cette réforme répond avant tout aux souhaits du patronat de détruire méthodiquement toutes les protections des travailleurs gagnées par la lutte.
Dans la continuité de la réforme des retraites, elle amorce un changement de système profond. Notre système d’assurance chômage reposant sur le travail et le salaire à travers les cotisations sociales ouvrant des droits sera remplacé par un minima social pour les plus précaires. On stigmatise ceux qui seraient des assistés alors même que plus d’un privé d’emploi sur 2 ne reçoit aucune allocation.
Cette nouvelle réforme repose sur trois grands axes applicables dès le 1er décembre :
1- Durcissement des conditions d’indemnisations.
Avec la réforme les salariés devront avoir travaillé 8 mois sur les 20 derniers mois au lieu de 6 mois sur les 24 derniers mois aujourd’hui afin de pouvoir être indemnisés. Les conséquences vont être désastreuses en particulier sur les jeunes et les plus précaires comme les intérimaires ou les saisonniers.
2- Diminution drastique de la durée d’indemnisation.
Déjà réduite en 2023, elle passera de 18 mois à 15 mois. Elle va avoir pour conséquence de pousser les privés d’emplois à accepter des emplois qui ne correspondent pas à leurs qualifications avec des salaires plus bas et de mauvaises conditions de travail. Concrètement cette réforme va précipiter de nombreux privés d’emploi vers le RSA et donc dans une précarité encore plus grande.
3- Diminution drastique des droits des demandeurs d’emplois dit « séniors »
A ce jour les demandeurs d’emploi en fin de carrière bénéficiaient de droits spécifiques en termes de durée d’indemnisations :
Aujourd’hui les Durées de droits au chômage selon l’âge à la fin du dernier contrat de travail sont les suivantes :
Cette réforme de l’assurance chômage supprime ces spécificités pour ramener ce que le gouvernement nomme « la filière sénior » aux plus de 57 ans avec une réduction de la durée d’indemnisation qui va passer de 27 mois aujourd’hui à 22, 5 mois.
Le gouvernement essaie de masquer sa violence en parlant de « bonus sénior ». En fait il s’agit d’un différentiel qui serait financé par les propres allocations du chômeur, le contraignant à reprendre un emploi moins bien payé au bénéfice de son futur employeur. Comme pour la prime d’activé, on fait financer par la collectivité le niveau de salaire que refuse le patronat. Une telle disposition signifie en creux que les cotisations de l’assurance chômage vont venir subventionner les entreprises et permettre une baisse générale des salaires à terme pour tous !!!
Comme la CGT a pu le démontrer la dernière réforme des retraites va allonger la période durant laquelle les travailleurs ne sont ni en emploi, ni à la retraite, appelé aussi « sas de précarité ». Avec cette réforme de l’assurance chômage adossée au recul de l’âge de départ à la retraite à 64 ans, ce « sas de précarité » va s’allonger et concerner un plus grand nombre de salariés dits « séniors ».
Cette réforme de l’assurance-chômage, après celle des retraites, pourrait encore être aggravée avec la suppression évoquée par Gabriel Attal de l’ASS (allocation spécifique de solidarité) qui indemnise les privés d’emplois en fin de droit. Cette mesure pourrait figurer dès l’automne dans le prochain projet de loi de finances pour 2025.
Cette réforme va donc simultanément réduire de façon drastique le nombre de personnes indemnisées à l’entrée et à la sortie du système d’assurance chômage, puisqu’elles ne seront plus éligibles aux allocations. Au vu de la conjoncture économique avec plus de 90 000 licenciements économiques annoncés et le faible nombre d’offres légales d’emploi, ces personnes vont venir inéluctablement venir grossir à terme les rangs du RSA.
C’est au chômage qu’il faut s’attaquer, pas aux privés d’emploi
Ainsi cette réforme prépare aussi le terrain à la future loi travail annoncée pour l’automne qui veut amplifier la flexibilité du monde du travail en remettant en cause toutes les protections restantes dont le contrat de travail afin de revenir à une main d’oeuvre malléable et corvéable à merci et sous payée.
Le macronisme se vautre dans le libéralisme jusqu’à l’absurde. Cette «réforme» est une honte absolue.
Elle ne lutte pas contre le chômage mais contre les chômeurs, afin de discipliner les travailleurs et de récupérer les excédents de l’assurance chômage. Elle n’a pas d’autre vocation, rien sur l’emploi, rien sur les salaires, rien sur l’égalité homme-femme, rien sur les conditions de travail, rien sur l’ubérisation, rien sur rien, voilà le projet de ce gouvernement de médiocres qui n’offre aucune perspective, si ce n’est celle de la lutte !