Les fautifs ne sont pas les malades !
De façon régulière, les arrêts de travail sont dans le collimateur des différents gouvernements selon lequel les indemnités journalières « coûtent » trop cher à la sécurité sociale et dont les seuls fautifs sont les salariés malades.
L’augmentation du budget des indemnités journalières à 16 milliards d’euros en 2023 est brandie partout en ce moment par le gouvernement comme un épouvantail pour justifier des mesures injustifiables.
Est-ce bien le budget des arrêts maladie qui est le problème alors qu’il représente seulement 6,35 % du budget de l’assurance maladie soit 254 milliards de budget pour 2024 ou les 80 milliards d’exonérations de cotisations octroyées au patronat qui manquent dans les caisses !!!
L’argument Budgétaire fallacieux
L’argument du budget est évidemment un argument malhonnête et fallacieux qui rend les malades coupables alors que la CNAM (caisse nationale d’assurance maladie) elle-même démontre que le premier facteur à l’origine de l’augmentation de ce budget l’an passé est le résultat des augmentations de salaires durant l’inflation et en particulier l’augmentation du SMIC. Le deuxième facteur est quant à lui sans surprise puisqu’il correspond aux répercussions des différentes réformes des retraites qui ont pour conséquences un vieillissement des travailleurs. Et c’est sans compter aussi sur l’augmentation de la sous déclaration des AT/MP en 2023 dont l’indemnisation est imputée au budget maladie.
Le patronat est à la manoeuvre pour attaquer l’indemnisation
Derrière cette propagande gouvernementale se cache évidement le projet d’un patronat qui veut en finir avec la Sécurité sociale et pour qui les arrêts maladie en est la pierre angulaire.
En effet, le système d’indemnisation des arrêts maladie est au cœur du système de Sécurité sociale de 45 car il ouvre des droits à un revenu de remplacement. C’est pour cela que l’indemnité journalière est calculée sur la base du salaire. La remise en question du système d’indemnisation des arrêts maladie, c’est une attaque fondamentale contre la Sécu et notre modèle social.
Notre modèle social associé aux comptes publics
Le 9 septembre dernier lors de son audition en commission des finance Bruno Lemaire ministre démissionnaire le dit clairement, c’est « Notre modèle social, c’est ça qui risque de faire réellement déraper les comptes publics dans les années à venir ».
L’attaque contre le système d’indemnisation des arrêts maladie est menée sur deux fronts simultanément par le gouvernement Barnier comme ses prédécesseurs :
1– Flicage des malades :
La suppression des services du contrôle médical de la Sécurité sociale pour les remplacer par un contrôle patronal des arrêts maladies.
Le 5 juillet dernier, en plein marasme électoral, le gouvernement publie un décret qui fixe les règles permettant aux employeurs de contrôler les arrêts de travail de leurs salariés et de mettre fin à leur indemnisation. Cette modification fondamentale du contrôle des arrêts maladie avait pourtant été retoqué par le conseil constitutionnel dans le PLFSS 2024.
Ce décret adopté en juillet dernier est totalement contraire aux fondements de la Sécurité sociale. Rappelons que l’article 22b de l’ordonnance de 19 octobre 1945 stipule que « l’assurance maladie comporte l’octroi d’indemnités journalières à l’assuré qui se trouve dans l’incapacité physique constatée par le médecin traitant de continuer ou de reprendre le travail ».
Mais ce décret passé dans l’urgence en juillet dernier était annonciateur d’une autre réforme majeure : la suppression des services du contrôle médical de l’assurance maladie dont l’annonce vient de tomber auprès de ses salariés. Les services du contrôle médical par leur indépendance vis à vis des CPAM et donc de la CNAM et du gouvernement sont une garantie pour les assurés contre les pressions des employeurs. Le rôle du contrôle médical repose avant tout sur l’état de santé de l’assuré et non sur des injonctions économiques.
Ce projet de démantèlement des services du contrôle médical de la sécu est un pion de plus avancé dans le changement de système annoncé et vient se corréler avec les préconisations de la cour des comptes et le changement de calcul des indemnités journalières (2ème front).
2– Baisse de l’indemnisation :
Un changement de système d’indemnisation des arrêts maladie.
Le gouvernement a déjà déclaré que les indemnités journalières feront l’objet d’un article du PLFSS 2025. Pour cela, il risque fortement de s’appuyer sur les recommandations de la cour des comptes communiquées en mai dernier, à savoir la réduction de la durée maximale d’indemnisation de trois à deux ans et l’augmentation du délai de carence de trois à sept jours ainsi qu’un arrêt de l’indemnisation des arrêts de travail de moins de huit jours.
Si ces mesures sont reprises par le gouvernement dans le prochain PLFSS, ce sont des milliers de salariés malades qui seraient précipités dans une grande précarité au moment où ils seraient le plus fragile !!! 8 jours sans salaires, ni indemnités journalières, c’est inacceptable !!!
A ceci vient s’ajouter la proposition de Thomas Fatôme directeur de la CNAM (caisse nationale d’assurance maladie) qui ce dit prêt à « réfléchir à un nouveau système d’indemnisation des arrêts de travail ». Un nouveau système d’indemnisation signifie toucher au calcul de l’indemnité journalière qui ne reposerait plus alors sur le salaire mais qui serait forfaitisée.
Cette mesure aurait pour conséquence une baisse des indemnités journalières, déconnectées du salaire. C’est la fin du revenu de remplacement, l’indemnisation des arrêts maladie ne serait plus un droit de Sécurité sociale mais une aide sociale
Si ces réformes des indemnités journalières sont menées jusqu’au bout, c’est une remise en question profonde du système de Sécurité sociale, c’est un changement de système. La forfaitisation des IJ assortie d’un contrôle médical aux mains du patronat signifie la mise en place d’un système à l’américaine. D’un côté il y aurait pour les salariés en arrêt maladie un filet de sécurité minimum au travers d’un « forfait » octroyé par une sécurité sociale d’État qui ne leur permettrait pas de vivre. De l’autre côté c’est la mise en place d’un système de prévoyance assurantiel sous contrôle des employeurs financés en partie par les salariés eux même. Ces réformes représentent une régression sociale majeure qui annonce le retour de la peur du lendemain pour tous les travailleurs malades. Cette peur du lendemain qu’Ambroise Croisat souhaitait éradiquer grâce la Sécurité sociale de 45.