Ce que le Président Macron doit entendre sur l'aide et le maintien à domicile
Pas d'augmentation de salaire
La branche représente 226 500 salariés dont 95% sont des femmes, travaillant à temps partiel, à hauteur de 89% et généralement subi.
Le financeur principal de la branche est le conseil départemental, via les heures APA. La dotation globale attribuée par l’état aux collectivités territoriales ne cesse de décroitre. Cette dotation qui représentait 40 milliards d’euros en 2014, était de 30,9 milliards d’euros en 2017, soit une diminution de pratiquement ¼ de la dotation globale en 3 ans. Alors que la loi vieillissement aurait dû permettre une augmentation des heures allouées aux bénéficiaires avec un reste à charge moindre, et une revalorisation des salariés de la branche. Ce qui n’est pas le cas, au vu des constats.
Des financements incertains en baisse
En ce qui concerne les SSIAD (service de soins infirmiers à domicile), dont le financeur est l’agence régionale de santé (ARS), les budgets alloués chaque année, stagnent. Depuis 2009, il n’y a aucune extension de lit, et aucune revalorisation des budgets. Le forfait journalier est d’environ 30€, frais infirmiers des libéraux compris. La signature de plans CPOM annoncent la mort prochaine des services de soins à domicile.
Les plus dépendants en GIR 1 et 2 devraient relever exclusivement des services de soins pour leurs soins d’hygiène et de confort, avec une prise en charge à 100% de la branche maladie. En effet ces personnes dépendantes ne rentrent plus dans le cadre de l’aide mais des soins. Quand la toilette est effectuée au lit, cela ne relève plus du métier de l’auxiliaire de vie, mais bien d’une aide-soignante. Ce n’est pas dans le référentiel métier de l’auxiliaire de vie sociale d’effectuer des toilettes au lit de personnes dépendantes. Or c’est une pratique courante dans la branche aussi bien associative que lucrative. Ces pratiques peuvent mettre en danger l’usager, lors des manipulations. Les services de soins et prestataires doivent se coordonner, pour les interventions à domicile en faisant des binômes de salariés, par exemple une aide-soignante avec une auxiliaire de vie.
Revoir le financement de la dépendance dans sa globalité
Le financement des heures APA, est trop disparate entre les départements. Il varie entre 18€ et 26€ selon les départements. L’étude 2014, sur les coûts, diligenté par la DGCS, devrait servir de référence et créer un coût horaire unique, situé entre 26 et 27 €, ou alors fonctionner sur un système de forfait journalier comme les services de soins. La revalorisation des services de soins est aussi nécessaire. Le forfait journalier actuel ne permet plus aujourd’hui aux services de soins de perdurer dans le temps. Des plans CPOM sont signés entre les ARS et associations, ce qui programme la mort prochaine des SSIAD. En effet, généralement quand ces services sont déficitaires, il est dû aux frais infirmiers des libéraux. Jusqu’ici, quand le déficit était dû à ces frais des libéraux, il était repris par les ARS. Au 1er janvier 2020, avec les signatures des plans CPOM, ce ne sera plus possible. Les services de soins vont donc se retrouver en difficultés financière et les services n’auront d’autres choix que de déposer le bilan. C’est inacceptable, car ces services ne font pas de bénéfices, ils interviennent au plus près de l’humain, leurs apportant des soins d’hygiène et de confort. De plus, ils n’interviennent pas que chez les personnes âgées dépendantes mais également aussi chez les personnes handicapées et auprès de patients atteints de pathologies lourdes et/ou en fin de vie, quel que soit l’âge. Une des solutions envisageables serait peut-être de sortir les frais infirmiers des libéraux, du forfait journalier des SSIAD, ou alors que les SSIAD embauche des infirmiers salariés, qui effectueront les soins aux patients relevant de ceux-ci.
Actuellement la journée de solidarité des actifs et la contribution additionnelle (CASA) des retraités, gérée par la CNSA, ne servent pas qu’aux bénéficiaires de l’APA, et aux salariés.
Effectivement de nombreuses associations en difficultés financières ont perçues depuis 2011, des fonds de restructuration, mais sans aucun retour sur investissement de l’utilisation de ces fonds perçus.
La CNSA finance également les formations à hauteur de 70% des plans de formation, généralement des formations non qualifiantes qui ne servent pas à grand-chose pour les salariés. Les formations qualifiantes devraient être la priorité pour une prise de qualité envers les usagers, et une reconnaissance envers les salariés.
La télégestion, via les smartphones, sont aussi financés via la CNSA. C’est donc de l’autofinancement indirect des salariés et usagers. Ce n’est pas un bon système, car le pointage à domicile engendre du stress aux salariés, qui accentue les risques psycho-sociaux. Avec ce système de pointage, lorsque le temps de l’intervention est dépassé, ce temps supplémentaire est facturé à 100% au bénéficiaire, par contre l’employeur ne comptabilise pas ce temps dépassé au salarié comme du temps de travail effectif. Nous pourrions dire que cette pratique est du travail dissimulé.
Les salaires :
Il est urgent de revaloriser les salaires de la branche. Alors qu’avec l’accord de 2002 sur la classification avait revaloriser les auxiliaires de vie sociales avec le diplôme d’état, avec une hausse de 25% à l’entrée en vigueur de l’accord.
A ce jour, les catégorie A (non diplômés) qui représente 41% des salariés de la branche, ont un coefficient inférieur au SMIC horaire. Le coefficient correspondant à la valeur du SMIC horaire correspond à la 13ème année d’ancienneté et 12 ans pour les catégorie B (peu qualifié) qui représentent 21% des salariés de la branche.
Ces deux catégories de personnel, représentent 62% des salariés de la branche, soit plus de 140 400 salariés qui ont un coefficient de salaire inférieur au SMIC, travaillent à temps partiel généralement subi et n’ont aucune évolution salariale.
Les catégories C (auxiliaire de vie sociale, aide-soignante) ont un coefficient de salaire correspondant à 4.5% au-dessus du SMIC horaire, alors qu’en 2002 il était de 25% supérieur.
L’augmentation de 1% de l’enveloppe annuelle allouée à la branche est donc en très grande partie consommée. En effet quand le QVT (glissement, vieillesse, technicité), l’impact d’effet report d’un accord agréé sont déduits, il reste généralement que très peu de moyens aux partenaires sociaux pour les négociations nationales. Généralement, chaque année, il reste 0.17% de l’enveloppe pour les négociations. C’est dérisoire, les partenaires sociaux ne peuvent négocier que des miettes de pain sec.
Les déplacements :
L’agrément en 2018, de l’avenant 36 sur les temps et frais de déplacement, signé par les employeurs de branche (USB) et la CFDT, crée des inégalités de traitement entre salariés d’une même branche. Effectivement cet avenant prévoit des clauses suspensives et cumulatives, et c’est pour cette raison que notre organisation syndicale, la CGT n’est pas signataire.
En 2018, cet avenant n’a été appliqué dans aucun département. Depuis janvier 2019, il est appliqué dans quelques départements dont la Dordogne, mais cela reste très à la marge. D’après nos dernières constatations, il y aurait que 4 départements qui ont mis ou vont mettre en application cet avenant. Nous souhaitons que le gouvernement finance, demande l’application de cet avenant à tous les financeurs (Conseil départementaux, ARS, etc.) en excluant de cet avenant les clauses suspensives et cumulatives.
Pour information l’extension de cet avenant est examinée par la sous-commission d’extension le 21 mai prochain.
Les conditions de Travail :
Les conditions de travail des salariés sont de plus en plus dégradées. Les études prouvent que la sinistralité du secteur est 4 fois supérieur à la moyenne nationale, même à celle du bâtiment.
– L’âge moyen des salariés licenciés pour inaptitude est de 49 ans et demi, pour une ancienneté de 9 années dans le secteur.
– Les temps de travail des salariés à temps partiel n’est pas respecté. Il est courant que les salariés travaillent plus de 35h hebdomadaires, en toute illégalité. Nous avons déjà observé que des salariés travaillent plus de 50h hebdomadaires tout en étant à temps partiel.
– Les droits conventionnels des salariés ne sont pas respectés. Un exemple parmi d’autres, sont des fiches de salaire négatives quand les salariés en sont en arrêt de travail.
– L’amplitude de travail de 12h maximum n’est pas respectée. Il est courant de constater des amplitudes de travail de 14h, voire plus. Il n’y a plus de conciliation entre vie privée et vie professionnelle avec de telles amplitudes.
– Les journées de travail sont surchargées, bien souvent au-delà de la durée légale de travail de 10h.
– La télégestion, via les téléphones portables professionnels procure du stress, et détériore les conditions de travail.
– Les rajouts incessants d’interventions sur les plannings des salariés, directement sur le téléphone portable professionnel génère du stress, isole de plus en plus les salariés qui ne se déplacent plus au siège de l’association, rompt la communication entre l’encadrement et le salarié, accélère les risques psycho sociaux, les troubles musculosquelettiques et les risques routiers. Ces rajouts incessants qui dégradent considérablement les conditions de travail des salariés provoque également des dérives concernant les droits légaux des salariés.
– Les temps d’intervention chronométrés sont trop courts. Comment voulez-vous en 30mn, intervenir auprès d’une personne dépendante en y effectuant : le levé, l’hygiène, l’élimination, le petit-déjeuner, installation, vaisselle, réfection du lit, etc.
Les modalités d’intervention et d’organisation du travail sont à revoir, aussi bien pour les salariés, que pour les usagers, patients ou famille que nous aidons, que nous accompagnons, ou que nous soignons, tous les jours.
L’état doit prendre conscience que les services d’aide, d’accompagnement et de soins à domicile sont d’intérêts publics et soit reconnus comme tel.
Un service public d’aide, d’accompagnement et de soins à domicile reconnu au même titre que la maladie au sein même de la sécurité sociale sans reste à charge pour une protection sociale de qualité et ainsi être soigné selon ses besoins et non selon ses moyens.
La situation en Corse
La branche de l’aide, de l’accompagnement et des soins à domicile est le premier employeur du secteur privé sur l’île, et représente 2400 salariés.
La couverture de la population de la région est de 7.3 salariés pour 1000 habitants et de 40 habitants de plus de 60 ans par salarié.
Comme sur le continent, la population vieillissante s’accroît et va continuer à s’accentuer.
Il y a un manque de personnel qualifié pour répondre à la demande grandissante.
Les moyens ne sont pas à la hauteur des besoins.
Les bas salaires de la branche, avec la vie plus chère en Corse, plongent les salariés dans la précarité.
L’avenant 36, n’est pas appliqué en Corse.
La non revalorisation de l’indemnité kilométrique depuis 2008, ne correspond plus à la réalité, surtout que sur l’île les prix du carburant sont plus haut que sur le continent.
Toutes les difficultés générales de la Corse sont identiques à celles rencontrées sur le continent.