Alors que le Projet de Loi de Financement de la Sécurité Sociale 2024 (PLFSS) va bientôt être présenté avec comme chaque année son lot de mesures régressives, la FNPOS CGT souhaite revenir sur ce que sont les lois de financements de la Sécurité sociale et en quoi elles sont une attaque fondamentale contre la Sécurité sociale en contribuant année après année à diminuer toujours plus ses moyens.
En cascade, c’est la réponse aux besoins en termes de santé, de retraite ou dans le cadre de la famille qui est abîmée.
À la genèse de la Sécurité sociale.
Rappelons que le système initial de sécurité sociale instauré par Ambroise Croizat reposait sur trois principes fondamentaux :
• Une organisation unique (caisse unique) qui couvre tous les aléas possibles de la vie des travailleurs (maladie, invalidité, retraite…) lorsque le revenu de leur travail se voit diminué. C’est la réponse au besoin
• Un financement totalement assis sur le salaire à travers la cotisation sociale. C’est le salaire socialisé.
• Une gestion entièrement sous le contrôle des organisations ouvrières (représentants des confédérations syndicales des travailleurs). C’est la démocratie sociale.
Dès le début le patronat n’a eu de cesse que de remettre en cause ce qui avait été mis en place. Il use de son influence politique pour obtenir en 1967 la fin des élections aux conseils des caisses par les assurés. Le patronat rentre ainsi dans la gestion des caisses avec ses positions rétrogrades.
De même le salaire socialisé qui prend directement sur la richesse produite ce qui en fait un système anticapitaliste sera continuellement attaqué à travers des exonérations de cotisations massives et l’introduction d’un financement par l’impôt avec la création de la Contribution Sociale Généralisée (CSG) en 1991. C’est la création de la CSG qui va venir légitimer ensuite l’introduction d’un contrôle étatique des finances de la Sécurité Sociale à travers notamment le plan Jupé de 1996 qui va instaurer les lois de financement de la sécurité sociale.
1996 – Les lois de financement de la sécurité sociale
Le plan Jupé de 1996 instaure à travers les Lois de Financement de la Sécurité Sociales un contrôle étatique fort sur son budget et de fait sur ses « dépenses ».
L’article 34 - définit les lois de financement de la Sécurité sociale comme des lois qui « déterminent les conditions générales de son équilibre financier et, compte tenu de leurs prévisions de recettes, fixent ses objectifs de dépenses, dans les conditions et sous les réserves prévues par une loi organique ».
Autrement dit, ces lois sanctuarisent une vision comptable de la Sécurité sociale dans une perspective de maîtrise d’évolution des dépenses (objectifs de dépense) et d’équilibre budgétaire (réductions des déficits et de la dette) au détriment de la démocratie sociale et donc des conseils des caisses.
Ces lois posent un cadre verrouillé d’équilibre financier du système qui dans un contexte de baisse constante de ressources (exonération des cotisations…) engendre quasiment mécaniquement une baisse des prestations versées aux assurés tel que les remboursements de soins, les modalités de prise en charge pour la petite enfance, ou les règles relatives à la retraite, etc.
Pour exemple, l’aggravation et l’augmentation des franchises médicales ont été mises en place par la Loi de Financement de la Sécurité Sociale (LFSS) de 2008
C’est la LFSS qui fixe aussi l’objectif national des dépenses d’assurance maladie ODAM avec une logique «d’objectifs-résultats» ainsi la question de la santé dans la LFSS, question fondamentale n’est traitée que sous l’angle de «l’efficience» et «la performance». Le résultat est simple alors que la France avait un des systèmes de santé convoité partout dans le monde, il est aujourd’hui après des années de LFSS au bord de la faillite et de l’asphyxie.
La LFSS peut se voir rectifié en cours d’année, c’est la Loi de Financement Rectificative de la Sécurité Sociale LFRSS. Cette loi rectificative a été très peu utilisée depuis 1996 si ce n’est en 2023 puisqu’elle a permis au gouvernement de faire passer en force la réforme des retraites.
C’est aussi en 2022 que La date de dépôt du PLFSS a été alignée sur celle du Projet de Loi de Finances (PLF), à savoir le 1er mardi d’octobre de l’année (au lieu du 15 octobre).
Ce rapprochement de la Loi de Financement de Sécurité Sociale et de la Loi de Financement n’est pas anodin face à la volonté d’une étatisation toujours plus grande de la Sécu. C’est un signe de plus d’un changement profond du système qui s’amorce pour aller vers un système à l’américaine avec une Sécurité sociale étatisée qui proposerait un minimum pour les plus précaire et en parallèle des systèmes de capitalisation très coûteux avec des prestations au rabais pour les autres.
UN CALENDRIER SERRE QUI MÈNERA DE TOUTE FACON A UN 49-3 !
Calendrier du projet de loi de financement 2024 :
• Le 27/09 : Conseil des ministres
• Le 29/09 à 15h : Commission des comptes de la Sécu
• Le 2/10 à 14h : Audition à l’Assemblée Nationale - table ronde avec les organisations syndicales autour du PLFSS
Les conseils CNAV, CNAF, ACOSS, CNAM doivent ensuite se prononcer en moins de 72h
• Le Parlement dispose ensuite de 50 jours pour se prononcer
• La LFSS doit être promulguer au plus tard au 31 décembre
En plus de la LFSS, le plan Jupé prévoyait aussi des outils de contrôle et de diminution des moyens de la Sécurité sociale, il s’agit des COG (convention d’objectifs et de gestion).
Les conventions d’objectifs et de gestion sont des contrats d’une durée de cinq ans conclus entre l’État et les caisses nationales de Sécurité sociale (leurs conseils ou leurs directions) qui déterminent leurs moyens de fonctionnement et leurs objectifs de gestion. Elles n’ont de cesse de pressuriser les personnels, dégradant le service au public comme leurs conditions de travail. La CGT s’est d’ailleurs opposée avec véhémence aux nouvelles COG signées et continuera à agir lors du vote des déclinaisons locales.
Pour la CGT, un des préalables à la reconquête de la Sécurité sociale est la suppression de ces lois de financement.
La CGT revendique une Sécurité Sociale financée par la cotisation sociale et gérée par les représentants des travailleurs. Elle revendique un financement qui s’adapte aux besoins comme l’avait imaginé Ambroise Croizat en créant une Sécurité sociale où chacun cotise selon ses moyens et reçoit selon ses besoins.
Nous proposons la création d’un régime universel basé sur la solidarité, financé par le salaire socialisé et géré par les intéressés eux-mêmes et couvrant l’ensemble des droits.
Le 100% Sécu, c’est pour :
Le droit à la Santé : une prise en charge totale pour toutes et tous, sans reste à charge sur les médicaments comme sur les soins et les dispositifs de santé, en courte ou en longue maladie, maternité, invalidité, accidents du travail, en ambulatoire ou en hospitalisation.
Le droit à la Famille : les prestations familiales doivent être universelles, non imposables, sans condition de ressources et dès le premier enfant. En outre, des droits nouveaux doivent être mis en place pour suivre la transformation de la parentalité, tout en promouvant l’égalité entre les femmes et les hommes. Par ailleurs, l’allocation logement doit être une prestation pour réduire les dépenses de logement des personnes modestes quel que soit leur âge et leur mode de logement.
Le droit à l’Emploi : une indemnisation de tous les demandeurs d’emploi sans exception, y compris les primo demandeurs d’emploi et les salariés précaires, fixée à 80 % du dernier salaire brut (minimum smic) et ce, jusqu’au retour à l’emploi et ce, à partir des missions fondamentales de conseil, d’accompagnement et d’insertion professionnelle s’adressant aux demandeurs d’emploi et aux salariés.
Le droit à la Retraite : une pension basée sur la répartition. L’âge de 60 ans doit redevenir l’âge légal de départ et le repère collectif au droit à la retraite. Les départs anticipés en retraite doivent être confortés et reconnus pour les salariés en carrière longue, les assurés handicapés, et ceux exposés à des conditions de travail pénibles, insalubres ou à risques. Le montant des pensions, a minima, doit se calculer sur les 10 meilleures années et/ou 75 % du dernier salaire brut. Enfin celles-ci doivent être indexées sur l’évolution des salaires.
Le droit à compensation de la perte d’Autonomie : une prise en charge totale pour toutes et pour tous quel que soit le type de prestation choisie (domicile, EHPAD…).