Une mesure phare pour lutter contre la pauvreté ?
Une concertation en trompe l’oeil, comme d’habitude !
Neuf mois après son annonce sans véritable surprise et après quelques tergiversations, une concertation a donc été ouverte le 3 juin à l’adresse des citoyens, des associations, des collectivités et des partenaires sociaux. Nous savons ce que le gouvernement entend par « concertation », cela consiste dans son esprit et dans sa pratique à créer l’illusion, à donner le change et à temporiser avant de passer en force sans tenir compte des « concertations ».
La pauvreté : l’échec de l’Europe et de la France
Le sujet est important. La stratégie « Europe 2020 » qui affichait comme ambition première de réduire le nombre de pauvres de 20 millions en Europe a échoué. La faute sans doute au contexte économique nous serinera-t-on, pourtant certaines catégories se portent bien et les dividendes versés aux actionnaires continuent de battre des records puisque selon les Echos ce sont près de 350 milliards d’euros de dividendes qui seront versés pour les entreprises européennes.
L’échec de l’Europe sur le traitement de la pauvreté ne doit rien à la fatalité mais aux politiques ultra-libérales qui sont conduites sans volonté réelle d’orienter les priorités à l’endroit des populations les plus fragiles (l’Europe compte 118 millions de personne sous le seuil de pauvreté, dont 9 millions pour la France).
Il suffirait donc de simplifier ?
Le gouvernement a donc affiché l’objectif d’une simplification du système de prestations sociales à partir de la fusion du plus grand nombre possible de dispositifs, cela pour lutter contre le non recours et favoriser l’adhésion à notre modèle social. Comme si le noeud du problème résidait dans « la complexité de notre système de protection sociale » que le gouvernement cherche à discréditer. Sans doute y-a-t-il des
mesures à prendre pour rendre les aides et les dispositifs plus lisibles, mais si ces aides sont en nombre c’est aussi qu’elles correspondent à des problématiques différentes : famille monoparentale, handicap d’un enfant, chômage, précarité, demandeur d’asile, accès aux soins, logement, etc.
Il ne peut s’agir que de mesures cosmétiques visant à simplifier là pour en raboter ailleurs. Non la question des moyens et d’une réorientation de la politique sociale sont les seules qui doivent être posées et traitées avec sérieux.
Budget constant
Derrière ces annonces consensuelles, une précision a immédiatement suscité l’inquiétude : cette réforme se fera à budget constant (Le Budget de l’État est verrouillé pour le quinquennat). Si le gouvernement se défend de vouloir faire des économies sur les plus pauvres, force est de constater que c’est la direction qui semble être prise.
Réduire le non-recours…à budget constant : Une fumisterie signée Macron !
Le gouvernement se défend de vouloir réaliser des économies budgétaires. C’est vrai, mais sous ces éléments de langage ce qu’il cache, c’est qu’il y aura une masse importante de perdants, qui pourrait atteindre jusqu’à 3,5 millions de foyers, soit près de 9 millions de personnes.
Il s’agit de fusionner un maximum de dispositifs pour réduire le non-recours aux prestations sociales (par exemple, 35% des personnes éligibles au RSA n’y ont pas accès), cela à budget constant.
Plusieurs problèmes insolubles vont se poser :
– Comment peut-on réduire le non-recours (c’est-à-dire augmenter le nombre d’allocataires) à budget constant sans faire de perdants ?
– Peut-on verser la même prestation (même montant et mêmes conditions d’accès) à une personne en situation de précarité, une personne en situation de handicap ou une personne retraitée ?
– Peut-on lutter contre le non-recours quand dans le même temps on ferme des centaines d’accueils partout sur le territoire ?
Les objectifs inavoués : Stigmatiser les publics les plus fragiles
La véritable intention du gouvernement se trouve dans la philosophie du RUA. Derrière l’annonce d’une suppression de l’allocation en cas de refus de plus de deux offres d’emploi dites raisonnables, il y a d’une part l’idée que les privés d’emploi sont sans emploi par choix et d’autre part l’idée qu’il faut trier les « bons pauvres » qui feraient la preuve de leur motivation des « mauvais pauvres » qui méritent d’être exclus du système d’aides sociales.
Fusionner ces aides et en automatiser le traitement servira de prétexte pour supprimer des postes dans les organismes de sécurité sociale.
Le Revenu Universel d’Activité est l’archétype de la fausse « bonne idée ». Non seulement il est mu par une idéologie foncièrement libérale et il conduira à créer des trappes à pauvreté dont il sera plus difficile encore de sortir tout en accentuant les phénomènes de précarité pour tous.