Pour certains qui sont engagés depuis de nombreuses années, c’est le combat de toute une vie qu’ils voient partir en fumée. Ce qu’ils pensaient être un autre monde possible dans la construction des jours heureux est démantelé et remis en cause par des réformes successives.
L’avenir qu’ils imaginaient radieux pour leurs enfants et petits-enfants s’obscurcit sous les sinistres augures d’une logique libérale triomphante.
D’autres, ceux qui ont été bercés par des crises économiques et financières durant leurs enfance et adolescence, pensaient trouver dans la force collective la capacité de résister, avec leurs aînés, au rouleau compresseur capitaliste.
L’avenir qu’ils imaginaient n’était plus ponctué de victoire mais consistait à éviter de perdre ce qui restait du modèle social et du vivre ensemble.
Pour les derniers arrivés, qui ploient malheureusement sous tant de difficultés individuelles, il leur revient la lourde tâche de sauver ce qui reste et sont confrontés à une déferlante d’un libéralisme sauvage, où la seule alternative semble résider dans le « marche ou crève ».
L’avenir n’en était plus un mais se résumait en une suite ininterrompue de précarité généralisée, réduisant à devenir l’auto entrepreneur de sa vie.
Ce constat générationnel d’une déchéance sociale, déclinée au gré du temps qui passe, aura aussi été jalonné de tentatives nombreuses de luttes éclatées ou dispersées qui ont brisé l’espoir et, parfois, la détermination des plus convaincus.
Tout ce qui fait notre unité, nos liens courageusement conquis parfois au détriment de vies humaines, semble se disloquer sur l’autel du capitalisme malgré nos tentatives de résistance.
Éveiller les consciences et lutter pour gagner
Dans ce contexte où la bête immonde avance à visage démasqué et gagne du terrain dans la conquête et le contrôle de tous les pouvoirs, notre responsabilité syndicale devient plus cruciale encore et notre capacité à contribuer à l’élévation des consciences n’a jamais été aussi déterminante pour l’avenir.
La reconnaissance d’une éternelle lutte des classes au sein de notre société ne peut que contribuer à la mise en place d’un rapport de force efficace et victorieux.
Car il s’agit bien de cela aujourd’hui : lutter pour gagner !
A cet égard, la lutte engagée par les « gilets jaunes » nous interroge fortement sur l’essence même de notre syndicalisme. Son caractère protéiforme et spontané semble nous reléguer au second plan de ce qui est pourtant une remise en cause de la politique générale menée depuis des décennies.
Pourtant, nous avons, par notre travail d’information et de communication auprès des salariés, contribué à l’émergence de cette révolte populaire, qui paraît nous laisser sur le côté de la route…
Il est clair aussi qu’à l’origine du mouvement, la revendication essentielle contre les taxes (avec un amalgame dangereux entre taxes et cotisations sociales), était suffisamment de « droite » pour unir les forces patronales, les lobbies, partis libéraux et le Rassemblement National, avec un leadership et une orientation profondément populistes.
Cependant, il nous faut constater aussi que ces forces nauséabondes sont aujourd’hui débordées par les ouvriers, chômeurs ou retraités, certes inorganisés, mais entrés en nombre dans ce qui est devenu un mouvement contre la vie chère et contre l’injustice sociale et fiscale.
La façon dont la plateforme libérale et réactionnaire a été enterrée, la façon dont sa bande de pseudos représentants a été ridiculement écartée, ainsi que la convergence avérée avec plusieurs cortèges CGT ou lycéens sont des éléments que nous ne pouvons ignorer.
Des revendications communes
Enfin, la mise en avant de plus en forte des mots d’ordre de hausse du SMIC et des pensions, de défense de la Sécurité Sociale et le rétablissement de l’ISF, sont des revendications que nous déployons de longue date.
Ainsi, un certain nombre des revendications, émises par le mouvement en cours, rejoignent inévitablement les nôtres et nous ne pouvons décemment rester étrangers à ce qui se passe aujourd’hui dans notre pays.
Notre rôle dans cette période n’est-il pas de mettre en évidence cette réalité revendicatrice et de provoquer, partout où cela est possible, la convergence des luttes ? La volonté n’est pas de récupérer cette légitime expression de la population mais de créer l’unité sur ce qui nous rassemble pour, ensemble, faire grandir le vent de la colère sociale.
La violence qui s’exprime est relayée efficacement par les médias, laissant de côté les manifestations ou mouvements organisés par la CGT (1er décembre, les raffineries, les ports et docks,…). Elle reflète la détresse sociale dans laquelle une grande partie des « gilets jaunes » se trouve.
Certes, des groupuscules d’extrême droite et autres casseurs professionnels ne sont venus que pour en découdre et discréditer toute forme de remise en cause du système. Mais la grande majorité ne demande que plus de justice sociale et une autre répartition des richesses.
Organisons la lutte
Malgré cela, rien ne justifie les exactions policières commises lors de ces évènements notamment à l’égard des lycéens qui manifestent contre la réforme universitaire. C’est le droit de manifester qui est en danger et, avec lui, notre démocratie.
Jamais nous ne tolérerons que notre jeunesse soit frappée par les matraques du pouvoir et emprisonnée dans les geôles gouvernementales.
Le temps est venu de relever la tête, à partir de notre histoire syndicale riche de plus de 120 ans de résistance aux forces capitalistes, de se mobiliser sur tous les fronts et de créer les conditions de la généralisation de la grève.
Partout, organisons des réunions de syndiqués, des assemblées générales, des intersyndicales pour proposer d’aller à la rencontre des salariés pour l’augmentation des salaires, la défense des services publics et la reconquête de notre protection sociale !
Là où nous le pouvons, déclenchons des mouvements de grève et interpellons les directions, le patronat et les élus politiques ! Nous devons faire éclater la marmite libérale par tous les moyens qui sont à notre disposition.
L’heure est à l’action car nous pouvons, et nous devons gagner !